Service de réanimation pédiatrique à l’hôpital Jeanne-de-Flandre : 700 entrées par an d’enfants souffrants. Sur le nombre, 31 sont diagnostiqués « bébés secoués ». Parmi eux, 10 à 20 % décèdent, 60 % conservent des séquelles graves et 20 % apparemment indemnes, présenteront des troubles du comportement.
« Plus l’enfant est jeune, plus les conséquences seront importantes » et impacteront son avenir explique le Dr Smagghe : retard de la parole et du langage, énurésie, symptômes psychosomatiques, troubles cognitifs et des apprentissages, du comportement, de l’attachement, isolement social, difficultés scolaires, déficience intellectuelle, intolérance à la frustration, dépression, conduites suicidaires, anorexie.
Ces enfants secoués sont des cas douloureux. Toujours une situation tragique pour l’enfant et délicate pour le personnel soignant qui manque de formation spécifique. Avec toujours la même question : « Comment peut-on faire ça à un enfant ? » Quand ils voient arriver des enfants présentant de multiples lésions cérébrales, thoraciques, rachidiennes, optiques, après avoir été secoués et même projetés au mur ou la tête mise dans un siphon de toilettes… comble de l’horreur.
Problème de santé publique majeur
La table ronde, à l’initiative de Danielle Gobert, présidente de l’association Les maux, les mots pour le dire, à la Maison des enfants, en lien avec la Maison du citoyen, le Conseil départemental de l’accès aux droits, l’Ordre des avocats, a apporté des réponses précises à cette interrogation légitime avec des spécialistes du SBS, syndrome du bébé secoué : psychiatre, neurochirurgien, réanimateur pédiatrique, néonatal, neuropédiatre, pédiatre, psychologue, assistante sociale, médecin légiste expert, médecin rééducateur, juge d’instruction, juge des enfants, avocat.
La maltraitance à enfant a été reconnue en 2006 problème de santé publique majeur. Reconnaissance tardive, mais aujourd’hui mieux prise en charge par les acteurs médico-sociaux. Dans le cas des bébés secoués, loin des clichés, il s’avère que l’adulte secoueur n’est pas nécessairement alcoolique, au chômage, vivant dans une courée. « Il est issu de tous les groupes économiques et toutes les cultures ». Et, ajoute le Dr Smagghe, psychiatre, « si l’on peut qualifier l’acte, il faut se garder de dire que l’adulte secoueur est maltraitant ! » Car les lésions peuvent être dues à « des soins inadaptés ».
Pas de profil-type ? Le Pr Vinchon neurochirurgien au CHRU de Lille précise pourtant que dans son service où ont été pris en charge 103 enfants maltraités et 92 accidentés, l’adulte secoueur est majoritairement jeune, un homme, père (55 %) ou beau-père, désœuvré ou une mère immature, isolée, une nourrice, qui ont été souvent eux-mêmes maltraités, ont subi violence conjugale ou familiale, un deuil, un déménagement, une séparation, une dépression postnatale (pour la mère), sont isolés ou présentent des troubles du comportement, des addictions.